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Informations de référence sur les thèmes généraux > Les médias

Les médias

Dans son autobiographie, le Président Mandela évoque une escale qu'il avait effectuée à Goose Bay, au nord du Cercle arctique, et où un groupe de jeunes Inuits était venu jusqu'à lui:

"... en dialoguant avec ces jeunes gens intelligents, j'ai constaté qu'ils avaient été témoins de ma libération de prison grâce à la télévision, et qu'ils connaissaient la situation en Afrique du Sud. "Vive l'ANC!", s'était alors écrié l'un de ces jeunes Inuits. Les Inuits sont un peuple aborigène qui, au cours de son histoire, a subi un mauvais traitement de la part de colons blancs; il y avait donc des parallèles entre le sort des Sud-Africains noirs et celui des Inuits. Ce qui m'a alors sidéré, c'est la manière dont notre planète avait "rétréci" au cours des décennies que j'avais passées en prison; pour moi, l'étonnement était grand de voir qu'un adolescent inuit, vivant sur le "toit du monde", avait pu être témoin de la libération d'un prisonnier politique à l'extrème pointe sud de l'Afrique. La télévision avait "concentré" le monde et, de ce fait, était désormais un instrument puissant d'élimination de l'ignorance et de promotion de la démocratie". 50

Ce processus, joliment décrit par le Président Mandela en un seul exemple significatif, est celui de la croissance exponentielle de la "médiatisation". Il y a un peu plus d'un siècle, en 1895, Marconi envoyait le premier message télégraphique; deux décennies plus tard, Edison inventait le phonographe. Au cours de décennies plus proches de nous, le progrès technique s'est accéléré après l'invention de la radio et de la télévision, puis de la diffusion à travers ces deux médias. En octobre 1957, au moment du lancement du "Spoutnik" soviétique - premier vaisseau spatial placé en orbite, sphère métallique de 60 cm de diamètre devant permettre de déterminer la densité de la haute atmosphère -, on aurait eu du mal à imaginer la forme actuelle de la communication médiatique. L'événement du Spoutnik fut retransmis sur toutes les radios, alors que le satellite soviétique devait tourner autour de la Terre pendant trois petits mois! Douze ans plus tard, en 1969, les Américains diffusaient, grâce à la télévision, des images globales de notre planète - autrement dit, dans son intégralité - et des premiers pas de l'Homme sur la Lune.

Aujourd'hui, le concept de "monde global" et la communication par satellite ou parabole sont au cour d'un traitement à la fois mondial et local des grands problèmes. Le premier système international de communication par satellite - Intelsat - a vu le jour en 1965. Depuis lors, les télécommunications de l'ère spatiale, les technologies de l'information et l'électronique par fibre optique sont venues compléter ce que l'on appelle traditionnellement les "médias de masse" pour constituer un ensemble d'instruments sans précédent - depuis le petit téléphone portable jusqu'à l'Internet -, permettant à chacun de diversifier sa vision du monde, de s'exprimer, d'entrer en relations avec les autres, de mieux comprendre l'évolution du monde, et de mieux y faire face.

L'univers des médias a permis une véritable révolution - qui se poursuit - de la perception individuelle des choses. Ainsi, il a fallu 38 ans à la radio pour toucher 50 millions d'auditeurs, puis seulement 13 ans pour la télévision, 16 ans pour la micro-informatique, et seulement 4 ans en ce qui concerne le réseau mondial de l'Internet - aujourd'hui instrument d'information dominant.

Les défis d'un monde riche en médias

La Commission de la Culture et du Développement de l'UNESCO, qui contribue à une analyse des tendances modernes de la communication et du rôle central de la culture occidentale dans le processus de mondialisation, qualifie les nouvelles technologies d'instruments offrant un champ immense et inédit à l'ensemble des médias. Les formes traditionnelles de censure ont de plus en plus de mal à se maintenir; les médias contribuent à un renforcement de l'esprit de solidarité mondiale, et les technologies multimédia créent un nouveau potentiel artistique et intellectuel.

Aujourd'hui, la facilité de reproduction et de diffusion s'oppose de plus en plus au contrôle - et, à fortiori, à la censure -, par les gouvernements, de l'information reçue ou diffusée. Les médias actuels permettent de soutenir la cause des peuples et de créer une citoyenneté plus "éclairée". Toutes ces technologies renforcent également l'esprit de solidarité mondiale - indispensable à la naissance d'une éthique planétaire. Les images médiatiques de la souffrance humaine incitent chacun à exprimer son souci et sa solidarité vis-à-vis de personnes à l'autre bout de la planète - cela prenant la forme d'une contribution aux initiatives humanitaires, et de revendications auprès des gouvernements, auxquels on demande des explications et une action concrète.

Malheureusement, il faut également souligner certains aspects négatifs de cette nouvelle donne. En citant des chiffres probablement inférieurs à la réalité, on peut dire qu'à l'heure actuelle, une centaine de journalistes sont détenus dans les prisons d'une vingtaine de pays pour avoir mis en pratique un droit reconnu haut et fort - à savoir la liberté d'expression -, sans parler de tous ceux qui ont payé de leur vie le simple exercice de leur métier.

Le fait de disposer ou non des moyens techniques adéquats constitue un autre problème. En effet, comment cette révolution des communications pourrait-elle toucher plusieurs centaines de millions de personnes vivant sans électricité, dans plusieurs centaines de milliers d'habitations des pays en développement? Ces personnes restent, à ce jour, les dépossédés de la révolution de l'information. Les nantis de cette révolution ne sont qu'une minorité: ce sont principalement les habitants des pays développés et des zones urbaines d'autres régions de la planète, qui ont généralement bon espoir de pouvoir bénéficier de connexions à la télévision par satellite ou aux réseaux internationaux d'information.

Saviez-vous que...

En ce qui concerne les pays en développement, le "maillon faible" de la chaîne d'infrastructures est souvent le "dernier kilomètre" entre le relais local et le domicile particulier. Certains pays africains sont tellement pauvres en matière de télécommunications que l'on y compte moins d'une ligne téléphonique pour mille habitants. Ou, pour illustrer ce fait de manière encore plus brutale, on compte plus de téléphones à Tokyo ou Manhattan que dans l'ensemble de l'Afrique. Le Rapport de 1999 sur le développement humain est une étude comparative mondiale de l'existence de lignes téléphoniques, de postes de télévision, de fax, d'ordinateurs personnels et de connexions à Internet. Les pays développés disposent en moyenne - pour mille habitants - de 502 lignes de téléphone, de 595 téléviseurs, de 45 fax, de 204 ordinateurs personnels et de 35 raccordements à l'Internet - alors que, toujours pour mille personnes, les pays plus pauvres ne disposent en moyenne que de 4 lignes téléphoniques, de 36 téléviseurs, de 0,2 fax, et que les ordinateurs personnels et l'accès à Internet y sont quasiment inexistants. A l'heure actuelle, la radio reste le seul moyen de diffusion suffisamment répandu sur l'ensemble de la planète; de plus, c'est un instrument qui répond également aux besoins des cultures orales.

 

Quels effets cette mutation très rapide a-t-elle sur notre perception des événements mondiaux?

 

En matière d'évolution des médias, on peut dégager trois dimensions majeures: 51

  1. L'évolution très rapide des télécommunications et des technologies liées aux médias a transformé la nature même de ces derniers. A la fois en termes d'espace et de temps, les médias font aujourd'hui partie intégrante de l'événement même. Le reportage en direct fait l'événement. On peut en citer pour exemples le débarquement des "marines" américains en Somalie et à Haiti, ou encore l'attaque de Beli Dom et de la station de télévision d'Ostankino, à Moscou.
  2. Dans les pays non démocratiques, ou dans les démocraties encore embryonnaires, les hommes politiques exercent une forte influence sur les médias. Et, dans les démocraties plus anciennes, la classe politique tente d'influer le plus possible sur les médias par des "directives" constantes. Mais, en retour, les médias sont également de plus en plus influents quant aux comportements et aux décisions des hommes politiques.
  3. La "marchandisation" est l'ennemie de la diversité des programmes - et notamment des émissions reflétant la réalité des minorités, de la culture parallèle ou de ce que l'on appelle les "sous-cultures". La recherche de l'Audimat affecte même les journaux télévisés et les reportages sur l'actualité politique. En effet, les émissions d'information et le choix des images censées refléter la réalité se caractérisent aujourd'hui par une certaine vulgarité et par la recherche à tout prix de l'insolite et du sensationnel. En conséquence, l'information "sérieuse" occupe de moins en moins de place dans les médias. Et les gouvernements ont de moins en moins la volonté d'assurer un service public gratuit pour l'auditeur ou le téléspectateur - les chaînes publiques étant aujourd'hui contraintes de se commercialiser. Dans ce contexte, c'est le public qui est perdant - il perd notamment l'accès à des sources d'information sérieuses.
L'article 11 de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (1992)

"Les Parties s'engagent, pour les locuteurs des langues régionales ou minoritaires, sur les territoires où ces langues sont pratiquées, selon la situation de chaque langue, dans la mesure où les autorités publiques ont, de façon directe ou indirecte, une compétence, des pouvoirs ou un rôle dans ce domaine, en respectant les principes d'indépendance et d'autonomie des médias:

a. dans la mesure où la radio et la télévision ont une mission de service public:

1. à assurer la création d'au moins une station de radio et une chaîne de télévision dans les langues régionales ou minoritaires; ou

2. à encourager et/ou à faciliter la création d'au moins une station de radio et une chaîne de télévision dans les langues régionales ou minoritaires; ou

3. à prendre les dispositions appropriées pour que les diffuseurs programment des émissions dans les langues régionales ou minoritaires"

 

La nécessité de nouvelles voies

Tout particulièrement dans une période de tensions et de conflits violents tels que ceux des Balkans, "de nouveaux canaux d'information, favorisant la libre circulation des données, pourraient et devraient contribuer au pluralisme, au développement économique et social, à la démocratie et à la paix... Et des programmes de formation à la déontologie journalistique devraient sensibiliser les journalistes au problème des préjugés et de la discrimination". 52

Sur Internet, l'un des portails majeurs de promotion de l'information sur les droits de l'homme - "One World" (www.oneworld.net) - résume de la manière suivante les quatre défis actuels pour une "démocratie des médias":

Liberté d'expression: beaucoup de progrès restent à faire

"Dans le monde entier, y compris en Europe, de nombreux journalistes sont encore harcelés, poursuivis, voire assassinés s'ils tentent de faire un travail d'information sur des sujets d'intérêt public", déclarait M. Walter Schwimmer, Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, le 3 mai 2001, à l'occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse. 53

  1. La liberté d'expression. L'approche traditionnelle de nombreux débats sur la "démocratie médiatique" a été d'insister sur le droit à la liberté d'expression. Au cours de la période de la guerre froide en particulier, les gouvernements des pays occidentaux fondaient pratiquement toute leur argumentation sur la censure exercée par l'Etat dans les pays du "bloc soviétique", afin de mieux mettre en lumière la liberté supposée de la presse occidentale. Cependant, si la liberté de parole reste un droit inexistant dans bon nombre de régions du monde, le fait de se concentrer exclusivement sur cet aspect a occulté des éléments encore plus essentiels de la démocratie des médias, dans de nombreux pays, aujourd'hui.
  2. Faire entendre sa voix. Dans les médias, la notion de démocratie dépasse de loin le simple droit à "dire ce que l'on a envie de dire". La démocratie médiatique consiste à permettre à chacun de "faire entendre sa voix". Si la technologie facilite effectivement - et plus que jamais - la publication d'un magazine "indépendant" (ou de votre propre "lettre vidéo"), il est, en revanche, plus difficile que jamais d'en faire bénéficier le moindre public, même si l'on trouve un distributeur prêt à amener ce matériel jusqu'aux quelques rares points de diffusion indépendants encore existants et disposés à l'archiver, l'impossibilité de consacrer plusieurs millions par an à la publicité fait que seuls quelques "acharnés" seront à même de se procurer le matériel en question.
  3. La concentration de la propriété. A l'heure actuelle, une forme de censure plus "raffinée" consiste - au lieu de sanctionner au moyen de l'arsenal juridique existant - à laisser fonctionner "normalement" les institutions capitalistes, qui oeuvrent de concert pour ancrer leur domination "idéologique". Le contrôle des principaux nouveaux médias est le fait de quelques-uns (à l'échelon national ou international), que ce soit dans le secteur privé ou dans le cadre d'un monopole de l'Etat. En d'autres termes, la majorité des entreprises médiatiques appartient à une infime minorité de "géants" de cette industrie. Que ce soit au niveau d'un pays, ou - de manière croissante - à l'échelle mondiale, ces cartels ont effectivement la mainmise sur les images et les récits à travers lesquels il nous est donné de "comprendre le monde". En lieu et place d'une authentique diversité démocratique, il nous est offert un nombre infini de versions différentes... du même produit! (les nuances se situant au niveau de l' "emballage").
  4. Maintenir la santé du système. Cette absence de diversité à de graves conséquences, dans la mesure où il est de plus en plus difficile de faire entendre "une autre voix" dans le concert majoritaire - et orthodoxe - des médias. Pour prendre un exemple, de quelle "couverture" médiatique ont bénéficié les quelques centaines de milliers d'opposants, en Amérique du Nord comme en Europe, à la Guerre du Golfe? Limiter la démocratie au niveau des médias équivaut à la restreindre également sur le plan politique - dans la mesure où les idées "différentes" sont délibérément écartées du champ public (notamment si elles sont susceptibles de nuire aux messages publicitaires).
La concentration du pouvoir

"Deux propriétaires d'usines nucléaires possèdent également deux des réseaux télévisés nationaux des Etats-Unis (General Electric est le propriétaire de NBC et Westinghouse possède la chaîne CBS). Le troisième réseau national appartient à une société de production de dessins animés et de cinéma en général: c'est en effet la compagnie Walt Disney qui est propriétaire de ABC". Tel avait été l'avertissement lancé par M. Ralph Nader, candidat à la présidence des Etats-Unis. Par ailleurs, un seul groupe publicitaire peut aujourd'hui accaparer 40% du marché. La concentration de pouvoir qui vient de se manifester par la fusion de "America On Line" (AOL), de Time Warner et du groupe Turner fait planer la menace d'une véritable hégémonie culturelle.

 

Estimez-vous que le "matraquage" commercial constant des médias de masse entrave notre liberté de choisir?

Estimez-vous que l'exposition des jeunes, par la télévision, à une idéologie malsaine de violence ou de racisme influe sur leur mode de pensée et leurs comportements?

Les ONG et les médias

1.Le Centre des Médias des pays baltes est une fondation (ou ONG) indépendante, à but non lucratif, qui soutient la démocratie, le développement social et une coopération pacifique par une participation active des médias, www.bmc.dk

2. L'AIM (Alternativna Informativna Mreza - Réseau d'information "alternatif") est un réseau de journalistes indépendants de l'ex-Yougoslavie et de la partie sud des Balkans, qui propose un service d'informations approfondies dans les langues locales et en anglais. www.aimpress.org

3. Reporters sans frontières est une organisation qui fournit des informations sur des journalistes ayant fait usage de leur liberté d'expression et ayant été, de ce fait, menacés, dans le monde entier. Cette organisation organise des pétitions et des campagnes consistant dans l'envoi de lettres et visant à défendre les journalistes en danger. Pour de plus amples informations, www.rsf.fr

Références

Human Development Report 1999, United Nations Development Programme (Programme des Nations Unies pour le Développement - PNUD), www.undp.org

Human Development Report 2001, United Nations Development Programme (Programme des Nations Unies pour le Développement - PNUD), www.undp.org

www.humanrights.coe.int/media

Our creative diversity, rapport de la Commission mondiale de la culture et du développement, UNESCO, 1995.

World Communication and Information Report, Publications de l'UNESCO, 1999.

Notes

49. Voir les informations de référence sur le phénomène de la mondialisation, page 394.

50. Nelson Mandela, Long Walk to Freedom, Little Brown and Company, London, 1994.

51. D'après Veran Matic, Président de l'Association des Médias électroniques indépendants (ANEM).

52. Déclaration de Sofia, le 13 septembre 1997 (ultérieurement adoptée - en tant que Résolution 35 - à la XXIXe session de la Conférence Générale de l'Unesco, en novembre 1997).

53. Pour de plus amples informations, cf. www.humanrights.coe.int/media.

 

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